Le monde de la course automobile amateur en deuil
Le petit monde du sport automobile est en deuil. L’un de ses plus beaux fleurons vient de nous quitter : Georges Quéron est décédé.
La famille a souhaité que son départ se fasse dans l’intimité.
Georges était comme ça. Un type exceptionnel, d’une modestie exceptionnelle.
Georges était l’un de ces pilotes-constructeurs comme on en voit de moins en moins. Il s’était d’abord fait connaître dès la fin des années 60 avec ses fameuses Dauphine proto. Les Dauphine Quéron, c’étaient des engins qui rivalisaient avec les Alpine-Renault pour un budget qui n’avait absolument rien à voir avec celui d’une Alpine.
Et ces fameuses Dauphine étaient si performantes qu’elles ont voyagé loin. En voici une photographiée dans une course en Espagne.
George a aussi beaucoup couru au volant de Jidé en écumant les épreuves, courses de côte ou rallyes de la région stéphanoise où il était connu comme le loup blanc. Mais il ne dédaignait pas s’engager aussi dans de prestigieuses compétitions plus lointaines comme la Ronde Cévenole 1976 aux côté de Claude Michy au volant d’une Jidé groupe V.
En 1978, on le retrouve, entre autres, au départ de l’une des rares courses disputées sur l’éphémère circuit de Karland avec une Jidé à moteur Cosworth. Georges était un pilote très éclectique. L’archétype de l’amateur. Amateur : celui qui aime…
En 1980 Georges prête sa Jidé au regretté Gérard Pradelle qui gagne le groupe « N » (national) à son volant. Précisons au passage que les autos de Georges ont traversé le temps en dépit des changements de réglementation qui auraient démotivé plus d’un pilote amateur. Gérard participera ensuite à plusieurs épreuves au volant de cette berlinette.
Après l’époque Jidé, Georges se lance dans la construction des Anima. La première est une Jidé modifiée. Les suivantes seront des Quéron presque à 100 %.
En 1982, les frères Bachelard remportent le scratch du rallye des Noix disputé sous la pluie avec une antique mais fringante Dauphine Quéron 1440. Pourtant, à cette époque, la voiture donnée favorite s’appelle déjà R5 Turbo…
C’est dans les années 80 que Georges et moi avons été adversaires. La Quéron Anima 420 i 100 % made in Saint-Etienne contre la R5 Turbo groupe B 80 % fausse et fabriquée à Maclas. J’avoue que j’étais très impressionné par le palmarès de Georges et que j’osais à peine lui dire bonjour. Pourtant c’était vraiment un pilote simple. Peut-être un peu ours quand même… De toutes façons quand on était un gamin de 25 ans et qu’on rencontrait un monsieur comme Georges, on se faisait petit et on essayait de récupérer quelques bribes de sa grande expérience. Et surtout on était émerveillé par la qualité de la finition de la 420 i.
Une voiture faite 100 % à la main qui développait 200 chevaux (sans turbo…) pour à peine 700 Kg. Á l’époque ma R5 turbo avait la même puissance pour 1040 Kg…
Á cette époque, la 420i était propulsée par un moteur de Renault 20 très fortement « Quéronnisé » accouplé à une boite Renault-Quéron à six rapports. Dans ces années-là, je n’ai vu qu’une seule boite à six rapports en rallye : celle-là…
Les années ont passé. L’anima a évolué. Georges a même abandonné ses chers moteurs Renault pour un Honda K20 nettement plus performant.
L’Anima-Honda photographiée en 2010 à Ledenon
Lors d’une visite de son banc-moteur il y a quatre ou cinq ans, j’avais été sidéré par ce qu’il arrivait à faire avec des moyens dérisoires. J’ai bien écrit dérisoires, pas ridicules… Georges avait imaginé, et fabriqué ses moyens de développement-moteur avec un budget restreint. Et tout ça pour obtenir des résultats réellement exceptionnels. Je dois bien avouer que moi qui ai eu l’occasion de travailler au banc-moteur avec une débauche de moyens ultra-modernes, ce jour-là, j’ai eu honte de moi.
Mais malgré les années, la passion est restée la même. Et Georges qui s’approchait de ses 70 ans continuait à courir avec la dernière Anima dotée d’une carrosserie à l’aspect modernisé. Á chaque départ de course aussi belle que si elle était neuve.
Bien plus qu’un pilote, bien plus qu’un préparateur, bien plus qu’un constructeur automobile, Georges Quéron était un gars qui a fait rêver au moins deux générations de passionnés. Nul doute que ce sont des gens de cette espèce qui suscitent des vocations. Il est probable que parmi tous ceux que Georges à éblouis, il puisse y avoir une autre Georges qui sommeille et qui à son tour fera rêver les passionnés en dépit de toutes les entraves que les autorités sportives et publiques ne manquent jamais de mettre à l’encontre des gens de ce calibre. Peut-être sont-ils jaloux que sans communication, sans artifice on puisse être sur le devant de la scène si longtemps, simplement par son implication dans son travail.
Le monde du sport auto amateur pleure l’un de ses plus passionnés représentants.
Mis à part celle prise à Ledenon, les photos qui illustrent cet article ont été découvertes sur Internet. Nous remercions leurs auteurs inconnus.
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